Toulon le 29 novembre 2018

PROJET DE QUAI CROISIÈRE A TOULON,  beaucoup de questions !

     Le mardi 11 juillet 2018  Mr. Hubert Falco assistait à une réunion de la CCI. Il a pris la parole pour évoquer le projet de quai croisière à Toulon (PLAN B au Mourillon). Selon VAR MATIN il a promis “d’étonner” dans les choix qui seront faits. L’environnement sera bien sûr sa priorité! Quant au Directeur des Ports il voit ” un site parfait qui va pouvoir accueillir à la fois des bateaux de croisière, des croisiéristes et ceux qui viendront les voir…..un site mixte lieu de porosité entre la terre et la mer”.

1- Le mot « étonner » et les engagements concernant l’environnement méritent quelques commentaires.

1- 1- Le Comité de Pilotage a donc travaillé depuis le 14 mars 2018 sans la participation d’un ou deux représentants de la société civile qui, pour certains, suivent les affaires portuaires depuis plus de 10 ans. Ceci est contraire aux demandes du gouvernement pour les projets de cette importance sans compter que s’agissant également d’un projet d’urbanisme, une concertation préalable est obligatoire.

Le même groupe de personnes qui a élaboré le PLAN A (vue d’artiste à suivre)  dans la darse nord en engageant des dépenses importantes dans des études pour un échec parfaitement prévisible prépare en ce moment le travail des aménageurs et architectes du plus haut niveau  qui seront choisis après un appel d’offre international couvrant la zone allant de Mayol à Pipady. Mais la Métropole, qui a déjà fait des choix, celui de parkings couverts sur deux niveaux quai Fournel et quai de la Corse, celui d’écarter du périmètre de l’étude les quais de La Seyne et Brégaillon et celui de créer une voie nord sud entre les ronds- points Bir-Hakeim  et Bonaparte aura rogné les ailes de ces personnalités compétentes.

1- 2- Avant d’être étonné on peut s’inquiéter des choix d’un président de la Métropole TPM qui, face aux grandes décisions portuaires, a changé de direction une première fois après le lancement en 2009 du “Grand   Projet Rade” qui délocalisait le trafic Corse à Brégaillon. Ce choix a été abandonné sous les pressions de la CCI et de la Compagnie concernée. Le scénario se reproduisait en 2016 avec la sortie d’un schéma directeur des ports qui replaçait les ferries à Brégaillon (plan à suivre). Ce projet intelligent et couteux (plus de 100 millions) était présenté à la Grande Commission Nautique de janvier 2017. Aucune objection n’a été soulevée par les participants mais on voyait bien apparaitre le mécontentement du Maire de la Seyne qui allait perdre les très grands paquebots au profit de Toulon et recevoir en compensation les ferries, cadeau électoralement peu porteur. Pour des raisons plus politiques que stratégiques Mrs Falco et Cavanna déclaraient par la suite que le déplacement des ferries à Brégaillon n’était plus à l’ordre du jour. Le PLAN A du quai de 400 m prévoyait donc en septembre 2017 leur maintien à Toulon.

1- 3- Concernant l’environnement, Mr Falco nous dit ” Si demain nous allons construire un quai croisière, nous allons le faire avec les normes environnementales qui s’imposent”. De quoi parlons-nous? S’il s’agit de l’électricité au quai, on ne comprend pas très bien. En effet pendant deux ans on nous a expliqué que ce n’était pas possible pour les ferries, RTE ne peut pas fournir ce qui est sans aucun doute faux. Pour un paquebot géant la difficulté de fournir la puissance nécessaire est probablement réelle et le coût est beaucoup plus élevé, de l’ordre de 6 millions pour trois quais destinés aux ferries et pas loin de 20 millions pour un seul paquebot. Le Directeur des ports a, il y a peu, clos le débat en annonçant  qu’il n’y aura pas d’électricité. Si Mr Falco parle des carburants utilisés par ces grands navires en escale en 2022 ou 2023, il n’y aura pas de nouvelle mesure s’imposant pour ceux marchant au fioul. Ce sera à la mer un fioul à 0.5% de teneur en soufre (en principe imposé au 01/01/2020) et à quai un fioul ou un diesel marin à 0.1% de teneur en soufre comme c’est obligatoire depuis plusieurs années et enfin respecté en 2018 à Toulon.  Ces carburants  restent cependant dangereux pour la santé des riverains. Il est certain que quelques paquebots géants récents ou modernisés seront en 2023 équipés soit de scrubbers (lavage des fumées) soit de moteurs fonctionnant au GNL mais l’escale à Toulon sera-t-elle leur premier choix ? L’impact environnemental est, dans ces deux cas, moindre pour certains polluants de l’air. Ces configurations sont admises dans les zones dites SECA ou ECA  à quai comme à la mer. Cependant en escale seule l’électricité fournie par le quai permet  une pollution zéro (aucun rejet dans l’air, aucun bruit, aucune vibration).

Sous prétexte d’un changement d’implantation du projet on ne doit pas oublier que les cheminées de ces monstres seront probablement à moins de 550 mètres de deux immeubles de 20 étages situés sous les vents de secteur sud ouest très fréquents l’après midi à la belle saison et à moins de 800 mètres de nombreux autres logements exposés aux fumées en cas de vents de nord ouest à sud ouest.

2-  Un quai de 400 mètres pour les plus grands paquebots à Toulon: Nécessaire, rentable, sorte de parc d’attraction?

– Le coût de construction du quai et de sa passerelle de liaison approchera 50 millions. . Un tel investissement est-il indispensable alors que l’attractivité de Toulon n’est pas confirmée? La Métropole cite toujours les bonnes statistiques de 2015 et 2016 mais depuis la fréquentation de Toulon/La Seyne s’est effondrée avec moins de 70 escales prévues en 2018. L’impact du terrorisme a entrainé à Marseille une baisse de 7% dans la même période. Il y a donc à Toulon un problème d’attractivité. Dans notre bassin nord de la Méditerranée occidentale les grands et/ou très grands paquebots visitent Barcelone, Palma, Marseille, Cannes, Villefranche, Monaco, Gènes et Ajaccio. Il faut être réaliste ces escales resteront plus cotées que Toulon/La Seyne. D’autre part la CCI a raté le coche de la fidélisation des armateurs des navires qui étaient déroutés sur La Seyne lorsque l’accès au port de Marseille était dangereux par Mistral très fort; l’entrée nord de ce port a été modifiée en 2016. Malgré les plaintes des passagers et les demandes des armements on a trop tardé pour investir à La Seyne dans plusieurs domaines, gare maritime, parking spécifique pour une tête de ligne, accès à la ville sécurisé et agréable  et navettes maritimes exclusives à un tarif correct. A Toulon la fréquente cohabitation de paquebots de moins de 300 mètres de long avec un, voire deux ferries et les véhicules débarquant et embarquant était une mauvaise image pour les passagers et ceci était toujours vrai en octobre 2018.

– Si on analyse plus précisément la fréquentation de Toulon/la Seyne en 2018 on constate que pendant la saison des croisières du 19 avril au 30 octobre le taux d’occupation des quais paquebots est de 13% à La Seyne et de 21% à Toulon. Ou est la saturation?  La Métropole mise sur l’augmentation à partir de 2020 du nombre de paquebots en opération en Méditerranée Occidentale et sur la saturation des ports les plus cotés. A-t-elle des engagements fermes de Compagnies éventuellement disposées à investir dans notre port ? Cela se fait. L’État et la Région confirmeront-ils une participation?

– La proximité du centre ville n’est pas un critère aussi déterminant pour le choix des escales que la Métropole veut bien le dire; Marseille où les nombreuses escales de paquebots se font  à l’Estaque, loin du Vieux Port est un bon exemple.

– La déclaration lyrique prêtée au Directeur des ports est en décalage avec la rigueur de la sécurité exigée aujourd’hui  au voisinage de navires abritant 5000 passagers et plus de 2000 femmes et hommes d’équipage.

Il n’y a pas de journées portes ouvertes ni comme autrefois d’apéritifs envisageables au bar des premières. Les armateurs seraient plutôt enclins à estimer qu’une moitié du navire  se trouverait bien proche du sommet de l’immeuble La Corvette. Il se dit qu’ils se sont intéressés à l’attentat de Las Vegas (distance 400m, 59 morts 527 blessés). Nous avons constaté récemment à La Seyne que la “grande plaisance” exigeait elle-même des mesures d’isolement.

 3- Conclusion-

Les spécialistes pourront mieux que nous évaluer le coût de l’ensemble des préliminaires nécessaires à  la mise en chantier d’un aménagement portuaire aussi important. On peut toujours dépenser de l’argent plus ou moins public pour rédiger un cahier des charges, payer une étude préparatoire etc….. si on écarte encore une fois à 9 ans d’intervalle le problème le plus important et le plus urgent qui est le devenir des ferries, on continuera à enfoncer le cœur de la ville de Toulon dans la médiocrité, à passer outre la santé des habitants, et à provoquer des engorgements de circulation.

Nous vous avons exposé nos nombreux doutes sur l’intérêt de donner une priorité à la construction d’un nouveau quai croisière. Nous posons d’ailleurs une question aux propriétaires et gestionnaires des ports, si vous êtes certains d’avoir dans 4 ans la clientèle pourquoi ne pas prolonger de 20 mètres, pour un coût très inférieur, le môle de La Seyne par un duc d’Albe d’un côté et des bollards de l’autre. Il serait aussi nécessaire de draguer à 11 mètres (voir carte SHOM à suivre). Les grands groupes de BTP spécialisés sont capables de tout faire.

Au moment où est annoncé un important projet de rénovation du centre ancien de La Seyne ce serait jouer loyalement le jeu métropolitain.

Jean Charbonnier

Plan A 2017

Plan B estimation mars 2018 sur carte SHOM de la rade

Plan B présentation le 20 novembre 2018 par TPM. Positionnement non définitif.
La Marine n’aurait pas encore donné son feu vert